À la fin de mon long WE de veille et de micro-intervention dans le cadre de la contestation des résultats de l’élection présidentielle en Iran, je me suis retrouvé, le lundi soir et surtout le mardi matin 16 juin devant un choix cruel… En effet, en quatre jours, #iranelection est devenu tellement populaire sur Twitter et dans les médias que des dizaines de milliers d’usagers se sont mis à participer. Rien de mal jusque là… C’est la grande démocratie 2.0!
Sauf qu’en ouvrant les portes à la masse des utilisateurs, se sont produit plusieurs phénomènes inédits. De un, les néophytes n’ont pas été capables de faire la différence entre les informations validées et les messages de désinformation et de deux, justement, sont arrivés en scène les Basij Twitter et ces derniers, facilement reconnaissables par leur entrée récente sur Twitter, leur nombre peu élevé de «followers », répandaient ainsi des faussetés :
Desinformation going on : #IranElection HAS NOT been blocked. Stop RTing false hastags7:41 AM Jun 16th
@oxfordgirl: Look at tweets spreading alarm, all have bwteen 20-40 followers and been tweeting less than 24 hrs=gov agents #iranelection
Loin de tenter de bannir Twitter, le POUVOIR a tenté de s’en servir lui aussi. Il a mis des milliers de Basij et de fonctionnaires au travail. Le nombre de nouveau comptes Twitter a sensiblement augmenté au cours des derniers jours en Iran. Et les nouveaux à twitter pour la révolution et la démocratie sont tombés dans le panneau. C’est là, la limite du journalisme citoyen, des twitters d’occasion, sans expérience de la couverture « live »de pareils évènements. Les prévenir équivaut presque à prêcher dans le désert… En est résulté ma décision de quitter le flux #iranelection .
Oh! Je ne leur jette pas la pierre. L’enfer est pavé de bonnes intentions… Et je ne peux que penser que cela nous ramène au débat entre les médias traditionnels et leur éthique journalistique et les médias sociaux. À des débats comme celui que nous avons eu récemment au 3e mardis de Montréal avec les journalistes en grève de Rue Frontenac et en particulier le conférencier et journaliste «dit» techno Jean-François Codère.
En fait, il n’y a pas de noir et de blanc en cette matière mais plein de zones de gris… Où commence et où finit la manipulation des médias, qu’ils soient traditionnels ou sociaux? Quel est le meilleur garant de la liberté d’expression ou de la liberté tout court? Les deux se font manipuler mais le nombre aurait-il raison cette fois? La rue (pas Frontenac) aura-t-elle raison des officines du pouvoir? C’est aux Iraniens de décider de leur sort… Comment pourrait-il en être autrement?
Je ne peux donc m’empêcher de noter le cynisme des médias traditionnels et de leurs porte-parole face à ce qui se passe là-bas et à une possible révolution. « La révolution Twitter n’aura pas lieu », titrent Scholars & Rogues, avec comme tête de proue la journaliste washingtonienne bien connue et habituée des conférences de presse de la Maison-Blanche, Helen Thomas. C’est ce qu’ils disent de leur Amérique mais ne pensent pas le moindrement que le monde ne se limite pas à eux.. Mais les USA sont multiples et donc, permettent aussi ce genre de billet: « We Will Never See Iranians The same Way Again ». Deux USA, deux visions du monde différentes. L’une cynique. l’autre pleine d’espoir et d’empathie. N’est-ce pas là ce qui a fait élire Barrack Obama ?
Sauf qu’il ne faut pas être totalement naifs au point de penser que ce qui se passe en Iran est uniquement une révolution verte ou rose, du peuple, par le peuple et pour le peuple. Il y a une lutte de pouvoir sous-jacente comme dans toute révolution. Celle-ci met en scène des acteurs connus: les Ayatollahs. Mais aujourd’hui, la rue semble échapper à leur contrôle… Le contrôle de l’information, la répression, la pensée unique, le dogmatisme et l’extrémisme. Qui aura le fin mot de l’Histoire?
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